C'est dans l'air du temps.
C'est écrit, entre les lignes, en commentaire, ou claironné sous forme d'article saignant. Des "journalistes", ou des élus, à la télé y font allusion, alimentent la "discussion" (et pendant ce temps là...)...
C'est un sujet abordé, et débattu, dans les rayons des supermarchés (distances de sécurité plus ou moins respectées, les magasins d'alimentation, seule sortie autorisée, sont devenus le lieux de rencontre, de ragotage, privilégiés). C'est un point sur lequel certains nous interpellent à grand renfort d'images rancies de champs de bataille, de héros sans états d'âmes (vraiment?) qui sacrifient leur vie au service des autres. On pèse et soupèse la "valeur" des soldats de la république qui "offrent" leur dévouement et leur vie au service de la nation. On met en avant l'immense dévouement des soignants, le courage sans faille des caissières, des postiers, des éboueurs...
Les beaux jours du confinement, où l'on louait notre travail et notre capacité à nous adapter, à continuer à enseigner dans dans l'adversité, est terminé. Les clichés remontent à la surface. Feignants et lâches.
Nos objections pratiques, comment enseigner (petit rappel nous avons "signé" pour enseigner) quand nous devons nous tenir à distance? Comment accueillir nos élèves et leur offrir un lieu et un atmosphère d'étude sereine quand le protocole sanitaire fait 63 (63!!!!) pages?, nos appréhensions (le mot est faible puisque cela peut aller, pour certains d'entre nous jusqu'à la terreur) face à la possibilité de servir de vecteur au virus, pour nos élèves, pour leurs parents, pour nos proches, pour nous (le 1er mort du Covid, en France était professeur), nos désarrois face au mode de communication de notre ministère de tutelle, rien (rien!!!) sauf ce que l'on a cru comprendre à la télé, face aux revirements complets, d'un jour à l'autre, nos propositions sont accueillies par des injonctions à "aller au front", à "avoir un geste héroïque pour la nation".
J'ai vu passer, sur le toile, ces posts poignants qui livrent les portraits de ceux qui sont tombés "au front".
Et, oui, je suis lâche, sans doute (même si j'y suis allée, je n'ai jamais cessé d'aller au charbon) mais je ne veux pas que l'un des miens, que l'un des leurs, apparaisse, je ne veux pas apparaitre, dans cette bouleversante galerie.