samedi 1 décembre 2018

Les jours sombres.

Je rêve de soleil, de sérénité.
Ma play list me joue "The partisan de Léonard Cohen" et il fait noir, encore.
Il fait si noir, si sombre. C'est lourd...
Les jours sombres pèsent. Me pèsent.
Les jours sombres où les quelques illusions que j'avais encore sombrent (je sais je tourne autour du mot. Tout comme "sa majesté" Mac rond a tourné autour du mot profond, profondément, mardi).
Ce n'est pas ce monde que j'avais rêvé pour mes enfants, ce n'est pas pour ce monde que je me bats chaque jour. A mon petit niveau.
Ce monde est devenu petit, étriqué, pour les gens. Avec l'objectif de finir le mois. Avec la conviction, assenée par les médias, la pub omniprésente, arrogante, abrutissante, que réussir sa vie c'est accumuler des biens...
Ce monde est devenu égoïste, où on ne le ne voit que du bout de sa lorgnette. Où l'autre a tort. Toujours. Où l'on dresse les uns contre les autres. Diviser pour mieux régner.
Ce monde où quelques uns confondent servir et se servir.
Où une "élite" (je vomis ce concept!) s'arroge tout pouvoir sur le peuple/la base/la cordée/les bouseux/les sans dents/... Au nom de la rentabilité. Au nom du capitalisme sensé sauver le monde.
Il fait si noir, si sombre. C'est lourd...
Les jours sombres pèsent. Me pèsent.
Pourtant la résistance est là. Les gilets jaunes bloquent les ronds points. Essaient de faire entendre leurs voix.  N'en déplaise à certain-e-s c'est formidable que ceux là, qui subissent, jours après jours, qui jusque là ne disaient rien, trop accablés par le quotidien, trop peu armés (au sens figuré du terme), trouvent la force de s'exprimer. Le déclencheur, les taxes sur les carburants, n'est que la goutte qui fait déborder le vase. Et, oui, il faut changer de façon de vivre, de circuler, de consommer, pour sauver le monde du naufrage. Oui, mais il faut aussi assurer le quotidien. La transition ne peut être contre les gens. Elle ne peut l'être sans eux. Ce n'est pas hurlant qu'ils ont tort (que j'ai tort, moi aussi), de prendre leur voiture tous les jours, qu'ils ont ont tort de manger des légumes de supermarchés, des plats sur emballés, plein d'additifs beurk (alors que tout autour de nous leur chante le contraire, noyés sous la pub, les fantasmes de voitures brillantes qui filent sur des routes dessertes, de téléphones profilés qui emportent au paradis rêvé de temps libre) que le monde va changer. Il doit changer. Avec les gens.
Il fait si noir, si sombre. C'est lourd...
Les jours sombres pèsent. Me pèsent.
La résistance est là et j'ai peur. 
Oui, j'ai peur. J'ai peur pour mes enfants.
Parce que les coups pleuvent, les grenades de désencerclement, assourdissantes, lacrymo, les attendent. Ceux qui veulent juste dire leur raz le bol. 
Et les médias ne parleront, sans doute, comme la semaine dernière que des exactions de quelques casseurs. Pas des assauts des "forces de l'ordre". Ceux qui ont signé pour "servir" (le pouvoir? La société? L'humain ou le matériel, les p'tits vieux, les gosses ou les devantures des magasins de luxe?).
Oui, j'ai peur. J'ai peur pour mes enfants.
C'est égoïste, n'est pas?
D'autant plus que nous les avons éduqués militants, engagés, actifs... Je suis fière de voir qu'ils osent porter leurs voix. Je suis triste qu'il faille en passer par des manifestations, des cris, des barrages, pour que, peut être (je l'espère) on les entende. Je suis fière mais j'ai peur.
J'ai eu peur quand Clovis m'a dit que le blocus du lycée se faisait avec des feux de poubelles et que la police était là, armée.
J'ai peur pour Simon et Arthur, à Paris aujourd'hui.
Et je pense aussi à d'autres mamans, à une autre maman dont le fils est peut être en première ligne, en face. Je déteste que ce soit possible.
Il fait si noir, si sombre. C'est lourd...
Les jours sombres pèsent. Me pèsent.
Ce n'est pas cette société que l'on m'a "vendu", ce n'est pas celle que je voulais offrir à mes enfants.
Liberté, égalité, fraternité.
Liberté? Normes, normes, normes, règles, règlements,... Qui tombent d'en haut, de ceux qui savent, eux, ligotent, étouffent. Liberté? Même dans mon boulot elle est assassinée, plus de liberté pédagogique...
Égalité? Je ne vais pas ressasser, jusqu'à la nausée, les cadeaux aux riches, aux financiers, la mort annoncée, amorcée de la sécurité sociale, des retraites par répartition. Même en regardant dans la lorgnette de ce gouvernement de banquier, par le prisme du "pouvoir d'achat", l'égalité n'est pas. Et le fait qu'elle ne le soit pas est clairement assumé. Les riches, l'élite (nausée) le sont, le resteront, le seront de manière exponentielle, et quelques miettes tomberont de leur table (s'ils ne les planquent pas dans un paradis fiscal) sur ceux qui les "servent". Les élites, ces élites, ne sont pas passées par l'école publique. Ils doivent rigoler de nos illusions de démocratie... Moi je les ai perdues.
Fraternité? Quelle "bonne" blague. Ceux qui recherchent des "coupables" regardent ce/ceux qu'on leur désigne: l'autre, l'étranger, le migrant, le chômeur, le jeune, le fonctionnaire, le fainéant...
Au moment où l'on devrait se serrer les coudes...
Il fait si noir, si sombre. C'est lourd...
Je rêve de soleil, de sérénité.

8 commentaires:

  1. J'ai peur aussi pour mes enfants et petits-enfants.

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  2. Je rêve avec toi Anne et avec tous ceux qui veulent encore rêver et y croire. Mais comme toi j'ai peur, et je sens bien qu'il nous faudra encore attendre et trinquer en attendant. Ton texte interpelle, puissions nous être nombreux à le partager, ce sera moins dur ! Bon, je vais à la manif, moi, de ce pas, aller bonne journée et bon courage.

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  3. J'espère que tu as des nouvelles d'Arthur et Simon, quand je vois les images, j'ai peur pour eux !

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    1. J'ai des nouvelles! Merci. Ils sont sur le retour. La journée a été longue...

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  4. Je crois que cette grande roue sera la photo de ta page de garde que je préfère ... et elle contraste tellement avec cette noirceur ambiante ... Merci pour tes écrits .. qui me pausent, me posent et me reposent ... ou me réveillent ...

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    1. Oui, de la légèreté... Voilà ce dont nous avons besoin. Merci à toi.

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