dimanche 15 octobre 2017

Contre vents et marées, suite.

Le début est là:

Partir, oui, mais comment? Je n'ai aucune compétences maritime. Je n'ai jamais pris la mer...
J'avais du penser tout haut. Lola, les yeux sur l'horizon infini, m'a répondu:
"J'ai une idée. Une idée folle... Si tu acceptes nous partirons. Cela demande juste un peu de temps, un peu de préparation". 
Elle m'a jeté un regard en coin, m'a fait un clin l’œil et m'a expliqué son plan. Cela faisait des mois qu'elle mijotait ça et tournant en rond dans sa maison de retraite, sa "résidence sénior".
Et son plan impliquait de liquider mon logement, le sien, celui de trois de ses amis.
Oh? Dans quoi étais je en train de m'embarquer?
Cette fois encore Lola m'a glissé une œillade amusée: "Mes amis te plairont, ils ne sont pas vieux, en fait, il ont de l'âge. Et, comme moi, ils ne veulent pas se dissoudre gentillement hors du monde. Le monde, grâce à ton soutien, nous allons le parcourir!"
Quand je me suis inquiétée du coût Lola a ri.
"Tu as une idée de ce que coûte une chambre en EHPAD? En maison de retraite? En foyer logement? Même en comptant les courts séjours entre chaque "rotations", que nous pourrons passer chez nos enfants, nous serons encore à la moitié de ce que nous payons pour le moment. Et avec le service en plus!"
Oh...
"Même en payant ton billet, ton "indemnité" de dame de compagnie, nous serons encore gagnants."
Encore gagnants...
Lola a sorti son portable (surprenante Lola!) et a appelé l'une de ses connaissances, un type hirsute et quasi muet qui nous a ramené en ville dans sa Deuche.
Et c'est là que j'ai commencé à préparer vraiment le départ.
Démarches administratives, transferts de comptes, élaboration d'un contrat de travail, réservation. Et Lola avait raison!!! Elle et ses amis dépensaient entre 2500 et 3200€ par mois pour avoir un chez eux adapté. Pour un peu plus de 1000€ ils seraient logés, nourris, service 24 heures sur 24, amusés, transportés. Idem pour moi!
J'ai pris le train, j'ai vidé mon studio, quelques cartons dans le garage d'une copine: "Tu vas où? Non? Mais tu es sure que ce n'est pas une arnaque?"
Non, je ne suis sure de rien mais je me jette à l'eau...
Enfin, je me lance dans l'aventure avec Lola.
Voyager, traverser l'atlantique par des chemins détournés.
En commençant l'aventure par Marseille.
Par Marseille où c'est fait la jonction.
Avec Lola, Gisèle, Monique et Lucien.
Nous nous sommes rencontrés dans un café.
Lola jubilait, Gisèle affolée par tant d'audace ressemblait à un lapin pris dans les phares, Monique sur son trente et un, vérifiait, encore et encore, son sac à main, papiers, médicaments, Lucien semblait impassible. J'ai respiré un bon coup, c'est parti! Et je leur ai fait deux bises chacun. Dame de compagnie j'étais devenue. J'ai fait un clin d’œil à Lola, qui a rayonné, j'ai posé ma main sur celle de Gisèle, qui a soupiré, j'ai proposé à Monique de prendre en charge son barda, qui m'a filé le "bébé" et j'ai demandé à Lucien comment c’était passé son voyage. Lucien a souri et m'a parlé du bouquin que le voyage en TGV lui avait permis de lire.
Et je me suis dit que nous étions fait pour nous entendre...
Puis le voyage a commencé, par un trajet en taxi. Deux taxis, réservés pour transporter mes "petits vieux" et leurs bagages jusqu'au terminal croisière. Nous sommes descendu au pied d'un navire immense, un vrai immeuble flottant, blanc, avec des lignes jaunes.
Lola, vive et rapide malgré sa canne, sa valise à roulettes rose qui sautille derrière elle.
Gisèle, tétanisée, un sac, une valise, un sac, une valise...
Monique, une valise griffée, un vanity case, un foulard, des lunettes.
Lucien, son livre.
"Lucien? Où sont tes bagages?"
Ok... J'y vais. Opération récupération de bagages oubliés.
J'avais bien fait d'anticiper. Lola glousse: "Je savais bien que tu ferais l'affaire".
Bagages confiés aux porteurs je soupire.
J'ai réussi. La première étape.
Et la seconde aussi, installation de chacune, de chacun, dans sa cabine. L'une des 1500...
J'ai fait le tour de mes protégés, Lola qui commence à fatiguer, Gisèle muette d'admiration devant tant de luxe, Monique qui teste le moelleux du lit, Lucien qui déballe son appareil photo. "J'aurais été très triste de le perdre! C'est un cadeau de ma petite fille. C'est un numérique. Et le numérique c'est génial parce qu'il n'y a pas besoin de pellicule".
Chacun a trouvé ses marques, j'ai posé mon sac de voyage dans mon nouveau domaine, beige et corail, "playstation sur demande" (?!) et je me suis dit que c'était une bien curieuse façon de prendre la mer.
Puis est arrivé le moment du départ et, tout les cinq, nous sommes montés sur le pont pour dire au revoir à Marseille, au revoir à la France, au revoir à la terre.
Nous n'avions personne sur le quai pour agiter un mouchoir mais nous avons fait un signe de la main.
Au revoir...

4 commentaires:

  1. Je trouve que tu ressembles à Lucien !
    J'attends la suite...
    Ton texte me fait penser au livre "La vie et rien d'autre".

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    1. Oui?
      Oui, il faut une suite (Gilles: "Mais c'est quoi ton texte?"). Je ne connais pas "La vie et rien d'autre".

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  2. Ah, j'aime bien cette suite ! moi, ça me fait penser au vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire, qu'est-ce que j'ai ri en le lisant ! et puis ça me fait aussi penser à "ensemble c'est tout" et au film :" Et si on vivait tous ensemble ? ". je crois que quelque part au fond de nos têtes on sait bien que c'est ça la solution, vivre ensemble et arrêter de s'isoler chacun de son côté dans sa petite vie.

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    1. Je suis surement influencée par quelques bouquins...
      Oui, ce n'est pas la première fois que j'écris sur ce thème.

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