vendredi 16 juin 2017

Commande.

C'est une première...
Et c'est un peu émouvant. Mon amie Valérie m'a passé une commande.
C'est émouvant pour plusieurs raisons:
Parce que c'est Valérie, que Valérie est une amie précieuse que j'ai un peu bousculée en choisissant de quitter l'école où nous travaillons toutes les deux depuis 15 ans. Que Valérie est une amie précieuse aux talents immenses. Une vraie artiste. Et pas seulement en dilettante, comme moi. Parmi ses nombreux talents, photographe amateur (éclairée!), créatrice de bijoux, (...) elle est tapissier en meuble. Et créatrice de tissu, pour tapisser des chaises, des fauteuils, des chauffeuses, en harmonie. Oui. Valérie est la fée de l'harmonie.
Et puis c'est émouvant parce c'est son grand père, prisonnier en Allemagne, que Valérie m'a demandé d'évoquer. En partant d'un dessin qu'il y a fait, et des renseignements qu'elle m'a fourni. Et que mon grand père à moi, Gaston, a lui aussi été prisonnier en Allemagne, travaillant dans une ferme, lui aussi était un homme d'art et de culture...
Ce texte accompagné du dessin retravaillé par Valérie est destiné au tissu qui couvrira une chauffeuse:

Madeleine, mon épouse aimée,

Que le temps est long, que la distance est grande, qui nous sépare!
Que notre petit Claude grandisse en mon absence est une douleur aussi grande que celle d'être prisonnier ici. Mes bras, qui s'usent en taches ingrates, au lieu de travailler le bois, enserrent le vide laissé par nos étreintes. Mes épaules qui transportent des charges disparates au service de mes gardiens s'affaissent de ne pouvoir soutenir notre fils pour un trajet familier.
Madeleine, mon aimée je me languis de toi, de notre enfant, du temps passé à vos cotés.
Je m'use le corps et l'esprit en basses besognes si lointaines de mon atelier, de son odeur de sciure, si distantes de la musique et des mots lus et écrits qui m'accompagnent chez nous.
Captif je suis, mais mon esprit efface le matricule pour me projeter au temps où je pourrais vous retrouver et nous ramener en notre quotidien perdu.
Madeleine, mon aimée, mes yeux, mes mains se souviennent si bien de ton visage doux, si sérieux en notre bonheur tranquille, de celui de notre enfant vif et curieux que je vole du temps au temps pour dessiner vos regards attentifs.
Je suis retenu loin mais je reste si proche en mon cœur.
J'aspire au temps des retrouvailles.

Madeleine mon aimée, je t'étreins et t'embrasse.
Tu déposeras pour moi une bise sur la tête blonde de Claude.

Étienne, ton époux dans la hâte du retour.

2 commentaires:

  1. Chère Anne !
    Merci beaucoup pour ce superbe texte écrit pour moi !
    Il est parfait. Dès que je l'aurai mis en image et en volume je te le fais voir.
    Quand à ton texte d'introduction, il me va droit au cœur.
    Merci encore Anne.

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    1. De rien, je l'ai fait avec plaisir. Avec beaucoup de plaisir.

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